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Page:Genlis — Mémoires inédits, (ed. Ladvocat), T2.djvu/76

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rôtie au vin ; elle ordonne avec vivacité de l’emporter ; ensuite, pensant qu’on va rencontrer M. le duc d’Orléans, elle rappelle mademoiselle Legrand, et lui dit avec véhémence de mettre la fatale écuelle avec son couvercle, sous son lit. On obéit. Au même instant, les deux battans de la porte s’ouvrent, et M. le duc d’Orléans paroît. Il sentit l’odeur du vin, et ma tante convint qu’elle en avoit pris une petite cuillerée. Son air exténué et languissant, durant cette visite, me donna plusieurs fois des envies de rire que j’eus de la peine à réprimer. Voilà à quel excès d’abaissement et de puérilité des desseins ambitieux peuvent conduire une personne d’esprit, lorsqu’elle croit que de tels moyens sont utiles à ses projets.

Ma tante voulut me garder dans sa maison jusqu’à son départ pour Barège. Elle me donna l’appartement de M. de Montesson, en me disant que ma femme de chambre auroit un lit de sangle posé à côté du mien. Nous étions aux premiers jours d’avril ; M. de Genlis venoit de partir pour son régiment. Nous revînmes de Vincennes à la nuit. Ma tante voulut sur-le-champ m’installer dans mon logement, qui étoit au rez-de-chaussée ; elle me