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qu’ils ne l’ont jamais été. Pas un principe bon ou mauvais ne circule maintenant dans la société, que toutes les conséquences n’en soient apperçues et déduites immédiatement. Cette logique savante et rigoureuse est le caractère général de notre civilisation présente. Il n’y a plus d’inconséquents par ignorance, il n’y a que des inconséquents par spéculation et par intérêt.

Il n’en était pas ainsi autrefois. Les idées nouvelles qui se répandaient de temps à autre dans les esprits avaient besoin d’y germer et de s’y élaborer longtemps avant de produire au dehors des effets quelconques, parce qu’il s’en fallait bien qu’on fût généralement aussi avancé qu’on l’est à présent dans cet art du raisonnement qui procède avec rapidité de conséquences en conséquences. Leurs effets étaient plus ou moins bornés, parce qu’on était loin d’avoir généralement acquis cette pénétration et cette étendue d’esprit qui embrassent d’un coup d’œil, comme nous le faisons, toutes les conséquences d’un principe, et le poussent aussi loin qu’il peut aller.

Jetez un regard sur les mille sectes hérétiques et schismatiques qui, depuis la naissance du Christianisme, se sont succédé presque sans interruption pour troubler et déchirer l’Église de Jésus-Christ, conformément à cette parole de saint Paul : « Il faut qu’il y ait des hérésies afin que l’on reconnaisse ceux qui ont une foi éprouvée. » Oportet hæreses esse ut qui probati sunt, manifesti fiant.

D’où vient que toutes ces sectes se sont bornées plus ou moins dans leurs progrès ? Qu’est-ce donc qui les a arrêtées ? Assurément, ce n’est pas la haine qu’elles portaient à l’Église catholique, ni le désir qu’elles avaient de lui faire le plus de mal possible ; cette haine et ce désir étaient poussés chez elles au dernier degré de fureur, mais c’est qu’elles ne concevaient pas toute la portée de leur principe et ne savaient pas en tirer toutes les conséquences. Elles ont toutes été inconséquentes, chacune d’elles rejetant une ou plusieurs des croyances chrétiennes, et aucune ne les rejetant toutes ; les unes et les autres prenant de la religion, selon la diversité de leur génie ou des