Page:Genoude - Les Pères de l'Eglise, vol. 2.djvu/484

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étaient environnés de gloire et d’éclat. Mais attendons la fin ; car le monde n’est point abandonné à l’impulsion aveugle du hasard, comme le prétendent certains philosophes dont l’opinion est aussi affreuse qu’elle est funeste ; ils veulent en faire le rempart de leur dépravation. Mais au contraire le juste sera un jour récompensé de sa vertu, comme le méchant sera puni de ses crimes, ainsi qu’il convient. » Vous voyez donc combien tous ces philosophes sont peu d’accord entre eux sur Dieu et la Providence ; ceux-ci ont reconnu, ceux-là ont nié l’un et l’autre. Aussi tout lecteur prudent doit peser les paroles de chacun d’eux, selon le conseil de Simylus : « Qu’ils soient ineptes, dit-il, ou pleins de sens, les poëtes ont d’ordinaire le droit de dire tout ce qu’ils veulent ; mais c’est à nous de juger. » C’est aussi le conseil de Philémon : « Rien, dit-il, n’est plus fâcheux qu’un auditeur inepte qui ne sait pas juger par lui-même. » Vous devez donc examiner avec soin tout ce qu’ont dit les poëtes et les philosophes, et ce que nous disons nous-mêmes, avant de prononcer un jugement.

VIII. Ceux qui rejetaient vos dieux les ont ensuite admis, et leur ont attribué les plus grands crimes. Les débauches de Jupiter surtout ont été pompeusement célébrées par les poëtes ; et Chrysippe va jusqu’à dire que Junon prêta sa bouche impure pour un usage infâme. Pourquoi rappeler les débauches de celle qu’on regarde comme la mère des dieux, de Jupiter Latiare qui avait soif de sang humain, et d’Atis qui fut cruellement mutilé ? Pourquoi parler de Jupiter, surnommé le tragique, qui baigna de sang, dit-on, sa propre main, et qui est honoré aujourd’hui comme un Dieu chez les Romains ? Je passe encore sous le silence les temples d’Antinoüs et des autres qu’on honore du nom de dieux ; car les gens sensés ne pourraient entendre mes paroles sans rire. Ainsi donc les philosophes qui ont professé une pareille philosophie sont accusés, par leurs propres écrits, ou d’impiété, ou d’une infâme turpitude. On trouve même dans leurs livres le conseil de dévorer les hommes, et ils donnent les dieux qu’ils adorent comme des modèles de tous les crimes que l’on peut commettre.