Page:Genoude - Les Pères de l'Eglise, vol. 2.djvu/513

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Très-bien, mon ami, tu n’as encore parcouru qu’un seul monde ; mais il en existe bien d’autres : le nombre en est infini. Me voilà donc obligé de visiter une multitude d’autres cieux, de nouvelles plaines éthérées, de mondes nouveaux. Partons sans plus tarder ; prenons des provisions pour plusieurs jours, et parcourons les mondes d’Épicure.

Je vole au delà des limites de Tétys et de l’Océan. Arrivé dans un monde nouveau comme on arrive dans une nouvelle cité, j’ai tout mesuré en peu d’heures. Je passe de là dans un troisième monde, puis dans un quatrième, dans un cinquième, dans un dixième, dans un centième, dans un millième ; et jusqu’où donc irai-je ? ne suis-je pas bien convaincu maintenant que tout n’est que ténèbres, nuit trompeuse, erreur sans fin, conception imparfaite, abîme d’ignorance ? Pour qu’il soit dit que mon esprit investigateur n’a rien négligé, je compterai jusqu’aux atomes qui ont donné naissance à tant de mondes. Mais n’y aurait-il pas quelque chose de mieux, de plus essentiel à faire ? Est-ce de tout cela que dépend le bonheur des familles et des états ?

J’ai tracé cette légère esquisse pour montrer à quel point se contredisent tous les systèmes de nos philosophes, comme leurs recherches vont se perdre dans un vague infini, aux bornes qui les arrêtent. Combien la fin qu’ils se proposent est inexplicable et vaine, puisqu’elle ne s’appuie ni sur l’évidence ni sur la raison !