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SAINT IRÉNÉE.

CHAPITRE II.


Lorsque le Christ, dans son infinie bonté, a daigné nous visiter, lorsqu’il est venu nous rendre capables de parvenir au salut, en versant son sang véritable pour nous et en offrant son vrai corps dans l’Eucharistie, il l’a fait par amour pour sa propre créature.


Il en est qui, dans leurs idées chimériques, voudraient prétendre que Dieu est venu sur la terre pour sauver des êtres qui ne lui appartenaient pas, comme un Dieu jaloux du bien d’autrui ; et pourquoi faire ? pour faire connaître à Dieu une humanité nouvelle qu’il n’aurait ni créée ni formée, parce que, dès le commencement, étant mécontent de son œuvre, il aurait renoncé à créer des hommes. D’après ce système, l’avénement du Christ aurait eu lieu sans motif, puisqu’il serait venu pour des créatures qui lui auraient été étrangères ; et d’ailleurs, comment nous aurait-il rachetés par son sang, s’il n’avait pas réellement revêtu notre humanité, pour rendre à l’homme sa ressemblance et sa conformité avec Dieu, qui lui avaient été données lors de sa formation, et que le péché lui avait fait perdre. En agissant ainsi, loin de s’emparer par ruse de la propriété d’autrui, il rentrait, au contraire, avec justice, en possession de ce qui lui appartenait ; quant au péché, il en effaçait la souillure par son sang ; quant à nous, qui recevions le bienfait de la rédemption, il faisait acte d’une bonté infinie. Car nous ne lui avions rien donné auparavant ; il n’avait pas besoin de nous et il ne nous demandait rien. Mais nous, nous avions besoin d’entrer en communication avec lui pour être sauvés ; c’est pour cela qu’il est descendu des cieux, qu’il est venu sur la terre pour nous rassembler et nous recueillir dans le sein de son Père.

Elle est donc chimérique de tous points l’opinion de ceux qui dédaignent ainsi de reconnaître tous les desseins de Dieu sur nous, qui refusent le salut à l’homme, et nient la régéné-