Page:Genoude - Les Pères de l'Eglise, vol. 3.djvu/92

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mort nous a délivrés, Jésus, qui a habité nos demeures mortelles, que ce Jésus même est le Verbe ! Car, s’il n’était pas le Verbe, est-ce que l’apôtre n’eût pas désigné par son nom celui d’entre les Æons qui se serait incarné pour notre salut ? Ce Verbe donc, ce Verbe du Père est descendu, est remonté aux cieux, s’est incarné, lui Fils unique de Dieu, pour exécuter les desseins de son Père envers les hommes. C’est le même qui a tout fait, et saint Jean, en le nommant, n’a nullement voulu parler d’un Æon de leurs ogdoades. Mais, d’après leur système, le Verbe même ne se serait pas fait chair. Le Sauveur dont ils parlent prend un corps mortel, providentiellement et inénarrablement préparé, invisible, impalpable ; et saint Jean, au contraire, parle d’une chair faite de la chair d’Adam, pétrie de ce limon, à qui Dieu souffla la vie : voilà la chair dont le Verbe s’est revêtu ; ainsi donc s’écroule, s’évanouit leur première ogdoade ; et il devient manifeste que les mots de Verbe, d’Unigenitus, de Vie, de Lumière, de Sauveur, de Christ, de Fils de Dieu, ne peuvent rien signifier en dehors de celui qui seul s’est incarné pour notre salut ; et avec cette ogdoade s’anéantit tout entière une hypothèse chimérique, un rêve, au moyen duquel ils tronquent les Écritures.

Est-ce assez de prendre de tous côtés des noms, des mots, de les rassembler, d’en faire un tout, d’en altérer le sens naturel, absolument comme ceux qui, ayant à travailler un sujet, s’attachent à prendre dans Homère quelques fragments de vers, quelques hémistiches ? Il semble ensuite aux ignorants que c’est Homère qui a fait les vers qu’ils lisent, qui a traité le sujet dont il s’agit ; l’art, l’habileté qu’ils y croient voir, les obligent à se demander si ce ne serait point Homère qui en serait l’auteur. Nous ne citerons qu’un exemple de ce genre de composition, qui fera juger de la manière des valentiniens, puisqu’ils en agissent de la sorte ; il s’agit de décrire la descente d’Hercule auprès de Cerbère, où l’envoie Eurysthée.

« Et le fils de Sténélus, le descendant de Persée, Eurysthée, envoie sur le rivage sombre Hercule, le héros aux