Page:Gentil, La chute de l’empire de Rabah, Hachette, 1902.djvu/248

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belliqueux, celui-ci voulut traiter avec Rabah, mais son neveu Kiari, outré de sa lâcheté, le tua, prit le pouvoir à sa place et marcha au-devant de Rabah qu’il rencontra non loin de Kouka.

Les débuts de la journée furent favorables aux Bornouans qui battirent les Rabistes complètement et s’emparèrent de leur camp, qu’ils mirent au pillage. Ce fut leur perte. Outré de sa défaite, Rabah rassembla ses soldats et leur reprocha leur lâcheté en termes violents. Il fit ensuite distribuer à chacun de ses chefs de bannière cent coups de courbache sur les reins, sans même excepter son fils Fad-el-Allah qui avait une grave blessure au bras. Seul, parmi ses chefs, Boubakar, le plus vaillant d’entre eux, fut exempt du châtiment. Après quoi, on se rua de nouveau sur les Bornouans, qui, surpris de ce retour imprévu, furent mis en déroute.

Kiari refusa de s’enfuir et, mettant pied à terre, attendit ses ennemis. Fait prisonnier, il fut amené devant Rabah qui lui demanda où était Kiari. « Il est devant toi et ne sollicite aucune pitié », répondit-il.

Le vainqueur lui donna le choix entre la mort ou la mutilation.

Kiari s’écria qu’il préférait la mort. On lui trancha la tête immédiatement. Après quoi, Rabah marcha sur Kouka qui fut détruit de fond en comble. Dans sa victoire, il n’épargna personne, et l’on m’a dit que plus de trois mille femmes ou enfants furent égorgés ce jour-là. Frappés de terreur, les Bornouans se soumirent et subirent le joug jusqu’au moment où Rabah à son tour paya ses crimes de sa vie.

Examinons maintenant son rôle, pendant les sept années qu’il fut sultan du Bornou.

Malgré l’horreur qu’on éprouve à la pensée de tous les forfaits qu’il a commis, on ne peut se refuser à lui accorder une certaine admiration. Après avoir vaincu le Bornou et le Baguirmi avec une poignée d’hommes, il rêvait la conquête du Ouadaï qui attendait sa venue en tremblant. Sans notre intervention, il aurait mis son projet à exécution au cours de l’année même