Page:Germaine de Stael - Lettres et pensées du maréchal prince de Ligne, Paschoud, 1809.djvu/255

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saint-gris du pauvre Béarnois, s’il avoit eu assez d’argent pour affranchir sa lettre.

Alexandre écrivoit bien, mais il a eu Quinte-Curce pour secrétaire. Son imitateur suédois parloit un latin gothique. J’aurois pu attraper quelque billet de César, ou d’Alcibiade, et j’aurois ouvert avec plaisir et avidité une lettre militaire ou amicale du grand Condé. Une réflexion qui m’arrive à présent (car je m’avise de tout, même de réfléchir), c’est que c’est sous les règnes, même les plus durs, que l’on a vu de grands hommes en guerre et en littérature ; mais je n’en vois point au milieu de l’anarchie et de ses atrocités. Quand Rome a eu des Sylla et des Marius, elle étoit soumise et partagée. Les Scipions étoient de grands aristocrates ; Périclès étoit une espèce de Roi ; Horace et Virgile auroient eu peu de succès pendant les guerres civiles. Si Montagne et le bon Lafontaine avoient vécu de notre tems, l’un avec ses vérités, l’autre avec ses naïvetés et ses distractions, ils auroient été pendus les premiers.

J’ai fait ma cour, une fois, à notre jeune Empereur que je trouve vieux, grâce à deux campagnes et à son éducation commencée par Joseph II, le Monarque infortuné dont le souvenir de Votre Majesté Impériale fait l’a-