Page:Gervaise de Latouche - Le Portier des Chartreux, 1889.djvu/149

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assuré que son cœur était charmé. N’est-il pas vrai, auriez-vous repris, que vous n’en attendiez pas tant du petit drôle que vous avez toujours méprisé ? Vous aviez tort, et il ne méritait pas le traitement que vous lui avez fait ; car vous voyez que les petits valent bien les grands. Adieu, ma chère Nicole ; je me nomme Saturnin, pour vous servir. Vous l’auriez embrassée, et puis vous l’auriez laissée là, bien étourdie de votre compliment ; vous auriez gagné la porte, vous l’auriez ouverte (on avait laissé la clef dans la serrure), et vous auriez été vous recoucher tranquillement dans votre lit. Dieu veuille que vous eussiez été capable de le faire aussi bien et aussi heureusement que moi.

Frappé de la bizarrerie des aventures qui venaient de m’arriver, j’attendis avec impatience que le jour vint m’apprendre qu’elles seraient les suites d’une nuit aussi singulière. J’étais charmé du désastre de l’abbé et de ma bonne fortune. Comme personne (excepté Mlle Nicole, sur la discrétion de laquelle je pouvais compter) ne me soupçonnait de rien, je me faisais d’avance une comédie de la figure que je verrais faire à nos acteurs nocturnes, et je me promettais d’autant plus de plaisir, que je serais le seul à qui elle devait être indifférente. M. le curé, disais-je, aura un air sombre, taciturne, sera de mauvaise humeur, fessera ; qu’il fesse, ce ne sera pas moi, ou je jouerai de malheur, Françoise examinera