Page:Gervaise de Latouche - Le Portier des Chartreux, 1889.djvu/169

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les b… et les f… avec une aisance que je n’aurais pas attendue de gens que j’avais toujours vus sous le masque de la réserve. Le prieur, voyant mon étonnement, me dit : Père Saturnin, nous ne nous gênons plus avec vous, parce qu’il est temps que vous ne vous gêniez plus avec nous, oui, mon fils, ce temps est arrivé. Vous avez reçu le saint ordre de prêtrise, cette qualité vous rend aujourd’hui notre égal et me met dans l’obligation de vous révéler des secrets importants qui vous ont été cachés jusqu’à présent et qu’il serait dangereux de confier à des jeunes gens qui pourraient nous échapper et divulguer des mystères qui doivent être ensevelis dans un silence éternel ; c’est pour m’acquitter de cette obligation que je vous ai fait venir ici.

Cet exorde imposant me fit écouter avec attention le prieur, qui dit : Vous n’êtes pas de ces esprits faibles que la fouterie effarouche : l’action de foutre est naturelle à l’homme. Nous sommes moines, mais on ne compte ni le vit ni les couilles, quand nous faisons vœu. Pourquoi nous interdire cette fonction toute naturelle ? Faut-il, pour exciter la compassion des fidèles, aller nous branler dans les rues ? Non, il faut garder un milieu entre l’austérité et la nature. Ce milieu est de donner tout à celle-ci dans nos cloîtres, et le plus que nous pouvons à l’austérité dans le monde. Pour cet effet, dans les couvents bien réglés, on a quelques femmes avec qui l’on