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HISTOIRE DE LA DÉCADENCE

son filet[1]. L’empereur combattit sept cent trente-cinq fois comme gladiateur. On avait soin d’inscrire ces exploits glorieux dans les fastes de l’empire ; et Commode, pour mettre le comble à son infamie, se fit payer, sur les fonds des gladiateurs, des gages si exorbitans, qu’ils devinrent pour le peuple romain une taxe nouvelle autant qu’ignominieuse[2]. On supposera facilement que le maître du monde sortait toujours vainqueur de ces sortes de combats. Dans l’amphithéâtre, ses victoires n’étaient pas toujours sanglantes ; mais lorsqu’il exerçait son adresse dans l’école des gladiateurs ou dans son propre palais, ses infortunés antagonistes recevaient souvent une blessure mortelle de la main du prince, forcés ainsi d’appuyer du témoignage de leur sang l’hommage que leur adulation rendait à sa supériorité[3].

Son infamie et son extravagance.

Commode dédaigna bientôt le nom d’Hercule, celui de Paulus, sécuteur célèbre, fut désormais le seul qui flattât son oreille : il fut gravé sur des statues

    sur l’arène quarante sénateurs et soixante chevaliers. Juste-Lipse, Saturnalia, l. II, c. 2. Ce savant a heureusement corrigé un passage de Suétone, in Nerone, c. 12.

  1. Juste-Lipse, l. II, c. 7, 8 ; Juvénal, dans la huitième satire, donne une description pittoresque de ce combat.
  2. Hist. Aug., p. 50 ; Dion, l. LXXII, p. 1220. L’empereur reçut pour chaque fois decies, H. S., environ huit mille livres sterl.
  3. Victor rapporte que Commode ne donnait à ses antagonistes qu’une lame de plomb, redoutant, selon toutes les apparences, les suites de leur désespoir.