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bords du Haut-Gange ; et dans une bataille navale qui eut lieu sur une branche de l’Indus, il mit en déroute quatre mille bateaux chargés des naturels du pays. Dehly, Lahor et Moultan, se virent forcées d’ouvrir leurs portes : la conquête du royaume de Guzarate tenta son ambition ; la fertilité de ce pays l’engagea à y faire un établissement, et son avarice se laissa séduire à l’inutile projet de découvrir les îles de l’Océan méridional qui produisent l’or et les aromates. Les rajahs conservèrent leurs domaines en payant un tribut ; le peuple racheta au même prix sa vie et sa fortune ; mais le zélé musulman fut cruel et inexorable pour la religion des Gentoux : on compte par centaines les temples et les pagodes qu’il fit raser ; il brisa des milliers d’idoles, et la matière précieuse dont elles étaient formées servit d’appât et de récompense aux serviteurs du prophète. La pagode de Sumnat se trouvait sur le promontoire de Guzarate, aux environs de Diu, l’une des villes demeurées aux Portugais de leurs anciennes possessions[1]. Elle était riche du revenu de deux mille villages ; deux mille brames y étaient consacrés au service de la divinité du lieu, qu’ils lavaient le matin et le soir dans de l’eau apportée du Gange, placé à une distance considérable ; ceux-ci avaient sous leurs ordres trois cents musiciens, trois cents bar-

  1. Les idolâtres de l’Europe, dit Ferishta (Dow, vol. I, p. 66). Voyez Abulféda, p. 272, et la Carte de l’Indoustan, par Rennel.