Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 11.djvu/401

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le Bosphore, lorsqu’il rencontra l’empereur qui ramenait les débris de l’armée dont il avait perdu la plus grande partie sur les bords du Méandre, dans une action glorieuse, mais malheureuse. La retraite de Conrad fut hâtée par le contraste de la pompe de son rival avec son état actuel ; la désertion de ses vassaux indépendans le réduisit à ses troupes héréditaires, et il emprunta quelques vaisseaux grecs pour exécuter par mer son pèlerinage de la Palestine. Sans égard pour les leçons de l’expérience ou la nature de cette guerre, le roi de France s’avança dans le même pays, et y éprouva la même fortune. L’avant-garde, qui portait l’étendard royal et l’oriflamme[1] de saint Denis, avait imprudemment doublé sa marche ; et l’arrière-garde, que le roi commandait en personne, fut obligée de camper le soir sans avoir rejoint d’autres partis de l’armée. Ils furent environnés pendant la nuit par une multitude de Turcs, plus habiles dans l’art de la guerre que les chrétiens du douzième siècle, et qui, dans le désordre et l’obscurité, forcèrent son camp, et détruisirent ou dispersèrent l’armée. Dans le trouble général, Louis monta sur un arbre : sauvé par sa valeur

  1. Comme comtes du Vexin, les rois de France étaient les vassaux du monastère de Saint-Denis ; la bannière du saint, qu’ils recevaient de l’abbé était de forme carrée et de couleur rouge flamboyante. L’oriflamme parut à la tête des armées depuis le douzième jusqu’au quinzième siècle (Ducange, sur Joinville, Dissert. 18, p. 244-253).