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Phocée[1], sur la côte d’Ionie, s’enrichissait par le commerce exclusif de l’alun[2], et assurait, par un tribut, sa tranquillité chez les Ottomans. Dans leur dernière guerre civile, le jeune et ambitieux Adorno, gouverneur des Génois, prit le parti d’Amurath, et arma sept galères pour le transporter d’Asie en Europe. Le sultan, accompagné de cinq cents gardes, s’embarqua à bord du vaisseau amiral, dont l’équipage était composé de huit cents des plus braves Français : sa vie et sa liberté étaient entre leurs mains ; et ce n’est pas sans répugnance que nous applaudissons à la fidélité d’Adorno, qui, au milieu du passage, s’agenouilla devant lui, et accepta avec reconnaissance la décharge des arrérages du tribut. Ils débarquèrent à la vue de Mustapha et de Gallipoli, deux mille

    cerne l’Ionie et les îles. Parmi les nations qui habitaient la nouvelle Phocée, il nomme les Anglais (Ιγγληνοι) ; cette citation atteste l’ancienneté du commerce de la Méditerranée.

  1. Pour l’esprit de navigation et de liberté de l’ancienne Phocée ou plutôt des Phocéens, consultez le premier livre d’Hérodote et l’Index géographique de son dernier et savant traducteur français M. Larcher (t. VII, p. 299).
  2. Pline (Hist. natur., XXXV, 52.) ne comprend point Phocée parmi les pays qui produisent l’alun. Il nomme d’abord l’Égypte, en second lieu l’île de Melos, dont les mines d’alun ont été décrites par Tournefort (t. I, lett. IV), également recommandable comme voyageur et comme naturaliste. Après avoir perdu Phocée, les Génois découvrirent, en 1459, ce précieux minéral dans l’île d’Ischia (Ismaël Bouillaud, ad Ducam, c. 25).