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DE L’EMPIRE ROMAIN. CHAP. II.

Union et obéissance.

La tranquillité et la paix intérieure étaient les suites naturelles de la modération des Romains et de leur politique éclairée. Si nous jetons les yeux sur les monarchies de l’Orient, nous voyons le despotisme au centre, et la faiblesse aux extrémités ; la perception des revenus ou l’administration de la justice soutenue par la présence d’une armée ; des Barbares en état de guerre établis dans le pays même ; des Satrapes héréditaires usurpant la domination des provinces ; des sujets portés à la rebellion, mais incapables de jouir de la liberté : tels sont les objets qui frappent nos regards. L’obéissance qui régnait dans tout le monde romain, était volontaire, uniforme et permanente. Les nations vaincues ne formaient plus qu’un grand peuple : elles avaient perdu l’espoir, le désir même de recouvrer leur indépendance, et elles séparaient à peine leur propre existence de celle de Rome. L’autorité des empereurs pénétrait, sans le moindre obstacle, dans toutes les parties de leurs vastes domaines ; et elle était exercée sur les bords de la Tamise ou du Nil, avec la même facilité que sur les rives mêmes du Tibre. Les légions étaient destinées à servir contre l’ennemi de l’état, et le magistrat civil avait rarement recours à la force militaire[1]. Dans ces jours de tranquillité et de sécurité générale, le prince et ses sujets employaient leur

  1. Josèphe, De bello judaico, l. II, c. 16. Le discours d’Agrippa, ou plutôt celui de l’historien, est une belle description de l’empire de Rome.