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HISTOIRE DE LA DÉCADENCE

services[1]. Mais en même temps qu’il rétablissait la dignité de ce corps respectable, il en détruisait l’indépendance. Les principes d’une constitution libre sont perdus à jamais lorsque l’autorité législative est créée par le pouvoir exécutif[2].

Il résigne son pouvoir.

Devant cette assemblée, ainsi préparée et formée selon ses vues, Auguste prononça un discours étudié, où l’ambition était cachée sous le voile du patriotisme. « Il déplorait, mais cherchait à excuser sa conduite passée ; la piété filiale avait exigé qu’il vengeât le meurtre de son père ; son humanité s’était trouvée quelquefois obligée de céder aux lois cruelles de la nécessité ; il s’était vu forcé de s’unir à d’indignes collègues. Tant qu’Antoine avait vécu, il avait dû défendre la république de la domination d’un Romain dégénéré et d’une reine barbare. Libre maintenant de satisfaire à la fois à son devoir,

  1. Dion Cassius, liv. III, page 693 ; Suétone, Vie d’Aug., c. 55.
  2. Auguste, qui alors se nommait encore Octave, était censeur ; et, comme tel, il avait le droit de réformer le sénat, d’en bannir les membres indignes, de nommer le princeps senatûs, etc. : c’était là ce qu’on appelait senatum legere. Il n’était pas rare non plus, du temps de la république, de voir un censeur nommé lui-même prince du sénat. (Tite-Live, l. XXVII, c. 11, et l. XL, c. 51.) Dion affirme que cela fut fait conformément à l’ancien usage (p. 496). Quant à l’admission d’un certain nombre de familles dans les rangs des patriciens, il y fut autorisé par un sénatus-consulte exprès : Βο‌υλης επιτρεψασης, dit Dion. (Note de l’Éditeur.)