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HISTOIRE DE LA DÉCADENCE

Ce nouveau prétendant à l’empire sentit les avantages particuliers de sa situation, et il sut en profiter. Son gouvernement, qui s’étendait jusqu’aux Alpes Juliennes, lui facilitait les moyens de pénétrer en Italie. [Il marche en Italie.]Auguste avait dit qu’une armée pannonienne pouvait paraître dans dix jours à la vue de Rome[1]. Ces paroles mémorables vinrent se présenter à l’esprit de Sévère. Par une promptitude proportionnée à l’importance de l’objet, il pouvait raisonnablement espérer de venger Pertinax, de punir Julianus, et de recevoir l’hommage du sénat et du peuple, comme empereur légitime, avant que ses compétiteurs, séparés de l’Italie par une immense étendue de terre et de mer, eussent été informés de ses exploits, ou même de son élection. Pendant sa marche, il se permit à peine le repos ou la nourriture ; toujours à pied, couvert de ses armes et marchant à la tête des légions, il s’insinuait dans l’amitié et la confiance des soldats, redoublait leur activité, relevait leur courage, animait leurs espérances ; et consentait avec joie à partager avec le moindre d’entre eux, des fatigues dont il avait toujours devant ses yeux l’immense récompense.

Il s’avance jusqu’à Rome.

Le malheureux Julianus s’était attendu, et se

  1. Velleius-Paterculus, l. II, c. 3. En partant des confins les plus rapprochés de la Pannonie, et en établissant que Rome s’aperçoit à deux cents milles de distance.