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lement quelques-uns pour être, par la suite, les victimes de la cruauté réfléchie de l’usurpateur. Ceux qui éprouvèrent les traitemens les plus doux, furent dépouillés de leurs emplois et chassés ignominieusement de la cour et de l’armée[1].

Tyrannie de Maximin.

Les premiers tyrans de Rome, Caligula, Néron, Commode, Caracalla, étaient tous de jeunes princes sans mœurs et sans expérience[2], élevés dans la pourpre et corrompus par l’orgueil du pouvoir, par le luxe de Rome et par la voix perfide de la flatterie. La cruauté de Maximin tenait à un principe différent, la crainte du mépris. Quoiqu’il comptât sur l’attachement des soldats, qui retrouvaient en lui les vertus dont ils faisaient profession, il ne pouvait se dissimuler que son origine obscure et barbare, que son air sauvage et que son ignorance totale des arts et des institutions de la vie sociale[3], formaient un contraste défavorable avec le caractère aimable de l’infortuné Alexandre. Il n’avait point oublié que, dans un état plus humble, il avait attendu plus d’une fois à la porte des nobles de Rome, et que souvent

  1. Hérodien, l. VI, p. 223-227.
  2. Caligula, le plus âgé des quatre, n’avait que vingt-cinq ans lorsqu’il monta sur le trône ; Caracalla en avait vingt-trois, Commode dix-neuf, et Néron seulement dix-sept.
  3. Il paraît qu’il ignorait entièrement le grec, dont un usage habituel, soit dans les lettres, soit dans la conversation, avait fait une partie essentielle de toute bonne éducation.