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empereurs du sénat, nom qu’ils leur donnaient par dérision. Ils les dépouillent de leurs vêtemens, et les traînent en triomphe dans les rues de Rome, avec le projet de leur faire subir une mort lente et cruelle. La crainte que les fidèles Germains de la garde impériale ne vinssent les arracher de leurs mains, abrégea les tourmens de ces malheureux princes, dont les corps percés de mille coups furent exposés aux insultes ou à la compassion de la populace[1].

Le troisième Gordien reste seul empereur.

Dans l’espace de peu de mois, l’épée avait tranché les jours de six princes. Gordien, déjà revêtu du titre de César, parut aux prétoriens le seul propre à remplir le trône vacant[2]. Ils l’emmenèrent au camp, et le saluèrent unanimement Auguste et empereur. Son nom était cher au sénat et au peuple : sa tendre jeunesse promettait à la licence des troupes une longue impunité. Enfin, le consentement de Rome et des provinces épargnait à la république, quoiqu’aux dépens de sa dignité et de sa liberté, les horreurs d’une nouvelle guerre civile dans le centre de la capitale[3].

  1. Hérodien, l. VIII, p. 287, 288.
  2. Quia non alius erat in præsenti. Hist. Aug.
  3. Quinte-Curce (l. X, c. 9) félicite l’empereur régnant de ce qu’il a, par son heureux avénement, dissipé tant de troubles, fermé tant de plaies, et mis fin aux discordes qui déchiraient l’état. Après avoir pesé très-attentivement tous les mots de ce passage, je ne vois point, dans toute l’histoire romaine, d’époque à laquelle il puisse mieux convenir qu’à l’élévation de Gordien. En ce cas, il serait possible de dé-