Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 10.djvu/185

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fuyards, pouvait se prolonger plusieurs jours sans qu’il y eût rien de décisif : des dénominations particulières distinguent les diverses périodes de celle de Cadésie. La première a été appelée la journée du secours, à cause des six mille Syriens qui vinrent à propos secourir les Arabes : la journée de l’ébranlement désigne sans doute le désordre de l’une des armées, et peut-être des deux ; la troisième, durant laquelle les charges se firent de nuit, a reçu le nom bizarre de la nuit du rugissement, à raison des clameurs discordantes des guerriers, qu’on a comparées aux sons inarticulés des animaux les plus farouches. La matinée du lendemain décida du sort de la Perse ; et un ouragan qui survint à propos jeta des nuages de poussière dans les yeux des mécréans. Le bruit des armes parvint jusqu’à la tente de Rustam, qui, bien différent d’un ancien héros de son nom, était mollement couché sous un ombrage tranquille, au milieu des bagages de son camp et d’une suite nombreuse de mulets chargés d’or et d’argent. Au bruit du danger, le général s’élança précipitamment hors de ce lieu de repos ; mais ayant été arrêté dans sa fuite par un Arabe, celui-ci le saisit par le pied, lui coupa la tête, qu’il rapporta au haut de sa lance ; et retournant aussitôt sur le champ de bataille, sema le carnage et la terreur dans les rangs les plus épais de l’armée persane. Les Sarrasins avouent une perte de sept mille cinq cents hommes, et représentent avec raison la bataille de Cadésie comme opiniâtre et