Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 10.djvu/273

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peut légitimement employer à l’usage des fidèles les compositions profanes des historiens ou des poètes, des médecins ou des philosophes[1]. Il faut peut-être supposer aux premiers successeurs de Mahomet un fanatisme plus destructeur ; mais dans ce cas, l’incendie aurait dû se terminer promptement par le défaut de matériaux. Je ne récapitulerai point tous les accidens qu’avait éprouvés la Bibliothéque d’Alexandrie, l’incendie qu’y occasionna involontairement César en se défendant[2], ou le pernicieux fanatisme des chrétiens, qui s’efforçaient de détruire les monumens de l’idolâtrie[3]. Mais si nous descendons ensuite du siècle des Antonins à celui de Théodose, une série de témoignages contemporains nous apprendra que le palais du roi et le temple de Sérapis ne contenaient plus les quatre ou les sept cent mille volumes qui avaient été rassemblés par le goût et la magnificence des Ptolémées[4]. La métropole et

  1. Voyez Reland, De jure militari Mohammedanorum, dans son troisième volume des Dissertations, p. 37. Ils ne veulent pas qu’on brûle les livres des juifs et des chrétiens à cause du respect qu’on doit au nom de Dieu.
  2. Consultez les Recueils de Freinsheim (Supplément de Tite-Live, c. 12-43) et d’Usher (Annal., p. 469). Tite-Live dit en parlant de la Bibliothéque d’Alexandrie : Elegantiæ regum curæque egregium opus, éloge dicté par un esprit noble, et vertement critiqué par l’étroit stoïcisme de Sénèque (De tranquillitate Animi, c. 9), dont la sagesse dégénère ici en déraisonnement.
  3. Voyez le Chapitre XXVIII de cet ouvrage.
  4. Aulu-Gelle (Nuits attiques, VI, p. 17), Ammien-Mar-