Pyrénées, à renverser dans la Gaule et l’Italie les royaumes des Francs et des Lombards alors sur le penchant de leur ruine, et à prêcher l’unité de Dieu sur l’autel du Vatican. De là subjuguant les Barbares de la Germanie, il comptait suivre le Danube depuis sa source jusqu’au Pont-Euxin, renverser l’empire de Constantinople, et repassant d’Europe en Asie, réunir les contrées qu’il aurait vaincues au gouvernement d’Antioche et aux provinces de la Syrie[1] ; mais ce vaste projet, qui peut-être n’était pas d’une exécution bien difficile, devait aux yeux des esprits vulgaires porter les caractères de l’extravagance et de ses visions de conquête. Musa ne tarda pas à être rappelé au souvenir de sa dépendance et de sa servitude. Les amis de Tarik avaient exposé avec succès ses services et le traitement qu’il avait reçu : la cour de Damas blâma la conduite de Musa ; elle soupçonna ses intentions, et le retard qu’il mit à obéir au premier ordre de rappel, en attira un second plus sévère et plus péremptoire. Un intrépide messager fut dépêché par le calife au camp de Musa, à Lugo en Galice ; et là, en présence des musulmans et des chrétiens, il saisit la bride de son cheval. La fidélité de Musa ou celle de ses troupes, ne lui permirent
- ↑ On peut comparer ce vaste projet, qu’attestent plusieurs écrivains arabes (Cardonne, t. I, p. 95, 96), à celui de Mithridate, de se rendre de la Crimée à Rome, ou à celui de César, de conquérir l’Orient, et de revenir en Italie par le nord ; mais l’entreprise exécutée par Annibal est peut-être au-dessus de ces trois grands desseins.