Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 10.djvu/419

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caires[1]. La mort du pape, chef spirituel et temporel de la ville, parut être un surcroît à tant de maux ; mais l’urgence de la situation écarta les formes ainsi que les intrigues ordinaires d’une élection, et la réunion des suffrages en faveur de Léon IV[2], sauva la chrétienté et la ville de Rome. Ce pontife était né Romain. Le courage des premiers âges de la république brûlait encore dans son sein, et au milieu des ruines de sa patrie il se tenait debout comme une de ces majestueuses et inébranlables colonnes qu’on voit lever leur tête au-dessus des débris du Forum. Les premiers jours de son règne furent consacrés à la purification des reliques qui furent mises en lieu de sûreté, ensuite à des prières, à des processions, et à toutes les cérémonies les plus solennelles de la religion, qui servirent du moins à guérir l’imagination et à relever les espérances de la multitude. On négligeait dès long-temps ce qui regardait la défense de la ville ; non que l’on comptât sur

  1. L’un des personnages les plus éminens de la ville de Rome (Gratien, magister militum et romani palatii superista) fut accusé d’avoir dit : Quia Franci nihil nobis boni faciunt, neque adjutorium præbent, sed magis quæ nostra sunt violenter tollunt ; quare non advocamus Græcos et cum eis fœdus pacis componentes Francorum regem et gentem de nostro regno et dominatione expellimus ? (Anastase, in Leone IV, p. 199).
  2. Voltaire (Hist. générale, t. II, c. 38, p. 124) paraît avoir été vivement frappé du caractère de Léon IV. J’ai employé ses expressions générales ; mais la vue du Forum m’a fourni une image plus précise et plus animée.