Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 10.djvu/522

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et dans les momens de péril leurs guerriers sentaient si bien leur ignorance, qu’ils aimaient mieux descendre de cheval et combattre à pied. N’ayant point l’usage des piques ou des armes de trait, ils s’embarrassaient de longues épées, de pesantes armures, d’énormes boucliers, et, si je puis répéter le reproche que leur faisaient les maigres habitans de la Grèce, un embonpoint, suite de leur intempérance, ajoutait à la gêne de leurs mouvemens. Leur caractère indiscipliné dédaignait le joug de la subordination, et ils abandonnaient l’étendard de leur chef, s’il voulait les tenir en campagne au-delà de l’époque fixée pour leur service. Ils étaient ouverts de tous les côtés aux pièges de l’ennemi, moins brave, mais plus astucieux. On pouvait les corrompre avec de l’argent, car ils avaient une âme vénale ; on pouvait les surprendre la nuit, car ils négligeaient de fermer leur camp, et ils faisaient mal leurs gardes. Les fatigues d’une campagne d’été épuisaient leur force et leur patience, et ils tombaient dans le désespoir s’ils ne pouvaient satisfaire leur appétit vorace par une grande quantité de vin et de nourriture. Au milieu de ces traits généraux de la nation des Francs, on remarquait des nuances locales, que j’attribuerais au hasard plutôt qu’au climat, mais qui frappaient les naturels et les étrangers. Un ambassadeur d’O-

    magnitudo, ensium longitudo, galearumque pondus neutrâ parte pugnare eos sinit ; ac subridens, impedit, inquit, et eos gastrimargia, hoc est ventris ingluvies, etc. (Luitprand, in Legat., p. 480, 481).