Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 11.djvu/441

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renfermé dans la sainte cite, mais elle était devenue le séjour de la discorde et de la consternation. Il pria, jeûna, prêcha et offrit de partager les dangers du siége ; mais soit attachement, soit esprit de révolte, ses mamelucks, encore frappés du malheur récent de leurs compagnons d’Acre, pressèrent le sultan par des clameurs de réserver sa personne et leur valeur pour la défense de la religion et de l’empire[1]. La brusque retraite des chrétiens délivra les musulmans, qui l’attribuèrent à un miracle[2] ; Richard vit ses lauriers flétris par la prudence ou l’envie de ses compagnons. Sur une montagne d’où l’on découvrait Jérusalem, le héros se voila le visage, et s’écria d’un ton d’indignation : « Ceux qui refusent de délivrer le Saint-Sépulcre de Jésus-Christ sont in

    dans la description de Bohadin (p. 7-9, 235-237), qui harangua lui-même les défenseurs de Jérusalem ; leurs terreurs n’étaient point un mystère pour les ennemis (Jacques de Vitry, l. I, c. 100, p. 1123 ; Vinisauf, l. V, c. 50, p. 399).

  1. Cependant, à moins que le sultan ou un prince Ayoubite ne restât dans Jérusalem, nec Curdi Turcis, nec Turci Curdis essent obtemperaturi (Bohadin, p. 236). Il soulève un coin du voile politique.
  2. Bohadin (p. 237) et même Geoffroi de Vinisauf (l. VI, c. 1-8, p. 403-409) attribuent la retraite à Richard lui-même, et Jacques de Vitry observe que dans l’impatience du départ, in alterum virum mutatus est (p. 1123). Cependant Joinville, chevalier français, accuse la jalousie de Hugues, duc de Bourgogne (p. 116), sans supposer, comme Matthieu Paris, qu’il s’était laissé corrompre par l’or de Saladin.