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tendue, exercèrent une cruelle vengeance sur les innocens sujets de l’empire, firent particulièrement sentir leur fureur aux prêtres et aux moines, et se dédommagèrent, par le butin qu’ils enlevèrent, de la perte de leurs richesses et de celle de leurs amis. À leur retour ils firent connaître à l’Italie et à l’Europe, la faiblesse, l’opulence, la perfidie et la haine des Grecs, dont les vices furent représentés comme les suites naturelles du schisme et de l’hérésie. Les pèlerins de la première croisade avaient négligé, par un scrupule de conscience, les plus belles occasions de s’ouvrir pour toujours le chemin de Jérusalem en s’assurant la possession de Constantinople ; mais une révolution domestique invita et força presque les Français et les Vénitiens à la conquête de l’empire d’Orient.

Règne et caractère d’Isaac Lange. A. D. 1185-1195. Sept. 12.

Dans le cours de l’histoire de Byzance, j’ai déjà raconté l’hypocrisie, l’ambition, la tyrannie et la chute d’Andronic, le dernier rejeton mâle de la famille des Comnène qui ait régné à Constantinople. La révolution qui le précipita du trône sauva la vie et produisit l’élévation d’Isaac-Lange, qui descendait, par les femmes, de la même dynastie[1]. Le successeur d’un second Néron aurait facilement obtenu

  1. Le sénateur Nicétas a composé en trois livres l’histoire du règne d’Isaac Lange (p. 228-290), et les charges de logothète ou principal secrétaire et de juge du voile ou du palais, ne donnent pas lieu d’attendre de sa part une grande impartialité. Il est vrai qu’il n’écrivit qu’après la chute et la mort de son bienfaiteur.