Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 12.djvu/274

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parjure, le vol d’un cheval ou d’un bœuf, étaient punis de mort, et les plus féroces des hommes conservèrent entre eux de la modération et de l’équité. L’élection du grand-khan fut réservée à l’avenir aux princes de sa famille et aux chefs des tribus. Il fit des règlemens pour la chasse, source des plaisirs et de la subsistance d’un camp de Tartares. La nation victorieuse ne pouvait être soumise à aucun travail servile : elle en chargeait les esclaves et les étrangers ; et tous les travaux étaient serviles à ses yeux, excepté la profession des armes. L’exercice et la discipline des troupes indiquent l’expérience d’un ancien commandant. Elles étaient armées d’arcs, de cimeterres et de massues de fer, et divisées par cent, par mille et par dix mille. Chaque officier ou soldat répondait, sur sa propre vie, de la sûreté ou de l’honneur de ses compagnons ; et le génie de la victoire semble avoir dicte la loi qui défend de faire la paix avec l’ennemi, qu’il ne soit suppliant et vaincu. Mais c’est à la religion de Gengis que nous devons principalement nos éloges et notre admiration. Tandis que les inquisiteurs de la foi chrétienne défendaient l’absurdité par la cruauté, un Barbare, prévenant les leçons de la philosophie, établissait par ses lois un système de théisme pur et de parfaite tolérance[1]. Son premier et seul article de foi était l’existence

  1. On trouve une conformité singulière entre les lois religieuses de Gengis-khan et celles de M. Locke (Constitutions de la Caroline, dans ses Œuvres, vol. IV, p. 535, édition in-4o, 1777).