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musulmans en Europe et en Asie, et furent rigoureusement emprisonnés à Bursa, toutes les fois que le sultan résida dans cette capitale. On pressait chaque jour Bajazet d’expier par leur sang celui des martyrs musulmans ; mais il leur avait promis la vie ; et soit qu’il eût ou pardonné ou condamné, sa parole était irrévocable. Au retour du messager, les présens et l’intercession des rois de France et de Chypre ne laissèrent point de doutes au vainqueur sur le rang et l’importance de ses prisonniers. Lusignan lui présenta une salière d’or d’un travail exquis, estimée dix mille ducats, et Charles VI envoya, par la voie de Hongrie, un vol d’oiseaux de fauconnerie tirés de la Norwége, six charges de chevaux du drap écarlate qu’on fabriquait alors à Reims, et de tapisseries d’Arras qui représentaient les batailles d’Alexandre. Après quelques délais occasionnés par l’éloignement plutôt que par aucun projet, Bajazet accepta deux cent mille ducats pour la rançon du comte de Nevers et des barons encore existans. Le maréchal de Boucicault, fameux guerrier, était de ce petit nombre d’heureux ; mais l’amiral de France avait péri dans la bataille, et le connétable, ainsi que le sire de Couci, dans la prison de Bursa. Cette rançon, dont les frais accidentels avaient doublé la somme, tombait principalement sur le duc de Bourgogne ou plutôt sur ses sujets flamands, que les lois féodales obligeaient de contribuer lorsque le fils aîné de leur souverain était armé chevalier, et pour le délivrer de captivité. Quelques marchands génois se rendi-