Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 13.djvu/133

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mola avec toute sa famille à ses soupçons ou à sa cupidité. Le titre de beau-père du sultan ne mit pas long-temps l’infortuné Démétrius à l’abri de l’exil et de la confiscation ; son abjecte soumission excita la pitié et le mépris de Mahomet. On fit passer à Constantinople les Grecs de sa suite ; on lui assigna une pension de cinquante mille aspres, jusqu’à ce qu’enfin l’habit monastique et la mort, qu’il n’atteignit que dans un âge avancé, le délivrassent du pouvoir d’un maître terrestre. Il n’est pas aisé de prononcer si la servitude de Démétrius fut plus humiliante que l’exil où se condamna son frère Thomas[1]. Lorsque la Morée tomba au pouvoir des Turcs, celui-ci se réfugia à Corfou, et de là en Italie, avec quelques compagnons dépouillés de tout. Son nom, ses malheurs, et la tête de l’apôtre saint André, lui valurent l’hospitalité au Vatican, et sa misère fut prolongée par une pension de six mille ducats, que lui firent le pape et les cardinaux. André et Manuel, ses deux fils, furent élevés en Italie ; mais l’aîné, méprisé de ses ennemis et à charge à ses amis, s’avilit par sa conduite et par son mariage. Il ne lui restait que son titre d’héritier de l’empire de Constantinople, et il le vendit successivement aux rois de France et d’Aragon[2]. Charles VIII, aux jours de sa

  1. Spondanus raconte, d’après Gobelin (Comment. Pii II, l. V), l’arrivée et la réception du despote Thomas à Rome (A. D. 1461, no 3).
  2. Par un acte daté A. D. 1494, septembre 6, et transporté dernièrement des archives du Capitole à la Biblio-