Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 13.djvu/21

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bler où l’innocence n’est pas toujours tranquille. Des guerres continuelles maintinrent la tranquillité des peuples et la discipline des soldats. La guerre était le métier des janissaires ; ceux qui échappaient aux dangers partageaient les dépouilles et applaudissaient à la généreuse ambition de leur souverain. La loi de Mahomet recommandait aux musulmans de travailler à la propagation de la foi. Tous les infidèles étaient leurs ennemis et ceux de leur prophète, et le cimeterre était l’unique instrument de conversion dont les Turcs sussent faire usage. Cependant la conduite d’Amurath attesta sa justice et sa modération. Les chrétiens eux-mêmes la reconnurent ; ils ont considéré la prospérité de son règne et sa mort paisible comme la récompense de son mérite extraordinaire. Dans la vigueur de son âge et de sa puissance militaire, il déclara rarement la guerre sans y avoir été forcé : la soumission le désarmait facilement après la victoire ; et dans l’observation des traités, sa parole était sacrée et inviolable[1]. Les Hongrois furent presque toujours les agresseurs. La révolte de Scanderberg l’irrita. Le perfide Caramanien, vaincu deux fois, obtint deux fois son pardon du monarque ottoman. Thèbes, surprise par le despote, justifia l’invasion de la Morée : le petit-fils de Bajazet put enlever aux Vénitiens Thessalonique,

  1. Voyez Chalcocondyles (l. VII, p. 186-198), Ducas (c. 33) et Marin Barletius, dans la Vie de Scanderberg (p. 145, 146). Sa bonne foi pour la garnison de Sfetigrade fut un exemple et une leçon pour son fils Mahomet.