Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 13.djvu/317

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pourrait compter les maux auxquels fut exposée la ville après la chute de l’empire d’Occident ? Le mal lui-même produisit enfin le remède. L’accumulation des décombres et de la terre détachée des collines a exhaussé le sol de Rome, qui maintenant élevé, à ce qu’on croit, de quatorze ou quinze pieds[1] au-dessus de l’ancien niveau, rend la ville moins accessible aux débordemens de la rivière[2].

Dévastations dont les Barbares et les chrétiens sont rendus coupables.

II. Les auteurs de toutes les nations, qui imputent aux Goths et aux chrétiens la destruction des monumens de l’ancienne Rome, ont négligé d’examiner jusqu’à quel point ils pouvaient être animés du besoin de détruire, et jusqu’à quel degré ils eurent le loisir et les moyens de se livrer à cette disposition. J’ai décrit plus haut le triomphe de la barbarie et de la religion, et je vais indiquer en peu de mots la liaison réelle ou imaginaire de ce triomphe avec la ruine de l’ancienne Rome. Nous pouvons, composant ou adoptant sur l’émigration des Goths et des Vandales les idées romanesques les plus capables de plaire à notre imagination, supposer qu’ils sortirent de la Scandinavie brûlant de venger la fuite

  1. M. Addison a remarqué dans son Voyage en Italie ce fait curieux et incontestable (Voyez ses Œuvres, t. II, p. 98, édit. de Baskerville).
  2. Le Tibre a cependant quelquefois endommagé la ville de Rome dans les temps modernes ; et les Annales de Muratori citent en 1530, 1557, 1598, trois grandes inondations qui produisirent beaucoup de mal (t. XIV, p. 268-429 ; t. XV, p. 99, etc.).