Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 13.djvu/338

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moi ? le corps de la devise était une peau de lion. L’orgueil ou la prudence des Ursins ne leur permit pas d’entrer dans la lice, où trois de leurs rivaux portaient ces devises qui prouvaient la fierté des Colonne : « Je suis fort malgré ma tristesse, — Ma force égale ma grandeur. » Celle du troisième « Si je tombe vous tomberez avec moi », était adressée aux spectateurs, voulant faire entendre, dit l’auteur contemporain, que tandis que les autres familles étaient soumises au Vatican, eux seuls soutenaient le Capitole. Les combats furent dangereux et meurtriers. Chacun des chevaliers attaqua à son tour un taureau sauvage, et il paraît que les animaux remportèrent la victoire, puisque onze seulement demeurèrent étendus sur l’arène, et qu’il y eut dix-huit chevaliers de tués et neuf blessés. Plusieurs des plus nobles familles purent avoir des pertes à pleurer ; mais la pompe des funérailles qui eurent lieu dans les églises de saint-Jean-de-Latran et de Sainte-Marie-Majeure, procura au peuple une seconde fête. Sans doute ce n’était pas en de pareils combats que les Romains devaient prodiguer leur sang ; mais en blâmant leur folie, il faut donner des éloges à leur bravoure ; et les nobles chevaliers qui étalent leur magnificence en exposant leurs jours sous les yeux des belles, excitent un intérêt d’un genre plus relevé que les milliers de captifs et de malfaiteurs que l’ancienne Rome traînait malgré eux à la boucherie de l’amphithéâtre[1].

  1. Muratori a publié une dissertation particulière (la