Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 2.djvu/195

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apaiser le ressentiment de Claude ; mais conduisez votre négociation avec secret : qu’elle ne parvienne pas à la connaissance des troupes de Dacie. Elles sont déjà fort irritées, et leur fureur pourrait s’augmenter. J’ai envoyé moi-même à leur chef quelques présens, n’épargnez rien pour les lui rendre agréables. Surtout qu’il ne soupçonne pas que son imprudence m’est connue. La crainte de ma colère le porterait à des conseils désespérés[1]. »

Cette lettre si humble, dans laquelle il sollicitait sa réconciliation avec un sujet mécontent, était accompagnée de présens consistant en une somme considérable, en habits magnifiques, et en vaisselle d’or et d’argent. C’est ainsi que Gallien sut apaiser l’indignation et dissiper les craintes de son général d’Illyrie ; et durant le reste de son règne la formidable épée de Claude ne fut jamais tirée que pour défendre un maître qu’il ne pouvait estimer. À la fin, il est vrai, il accepta la pourpre teinte du sang de Gallien ; mais, éloigné du camp des conjurés, il n’avait pas trempé dans leurs complots ; et quoique peut-être il applaudît à la chute du tyran, nous osons présumer qu’il n’y eut aucune part[2]. Claude avait environ cinquante-quatre ans lorsqu’il monta sur le trône.

  1. Hist. Aug. p. 208. Gallien décrit la vaisselle, les habits, etc., en homme qui aimait ces objets de luxe, et qui s’y connaissait.
  2. Julien (orat. I, p. 6) assure que Claude obtint l’empire d’une manière juste et même sainte ; mais on peut se méfier de la partialité d’un parent.