Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 2.djvu/323

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Plusieurs des institutions que nous avons coutume de rapporter au système féodal, paraissent venir originairement des Barbares celtes. Lorsque César subjugua les Gaulois, cette grande nation se trouvait déjà divisée en trois ordres ; le clergé, la noblesse et le peuple. Le premier gouvernait par la superstition ; le second par les armes ; le troisième, entièrement oublié, n’avait aucune influence dans les conseils publics. Des plébéiens, accablés de dettes ou exposés à des injures continuelles, devaient naturellement implorer la protection de quelque chef puissant, qui disposât de leurs personnes et de leurs propriétés avec une autorité semblable à celle que, parmi les Grecs et les Romains, un maître exerçait sur ses esclaves[1]. La plus grande partie de la nation, insensiblement réduite en esclavage, et condamnée à des travaux perpétuels dans les terres des nobles, éprouva la servitude de la glèbe, et gémit sous le poids réel des chaînes, ou sous le joug puissant et non moins cruel des lois. Durant les troubles qui agitèrent la Gaule depuis le règne de Gallien jusqu’à celui de Dioclétien, la condition de ces paysans esclaves avait été singulièrement misérable ; ils subirent à la fois la tyrannie de leurs maîtres, celle

    veté de cette histoire se perd dans nos meilleurs ouvrages modernes.

  1. César, De bell. gall., VI, 13. Orgetorix, de la nation helvétienne, pouvait armer pour sa défense un corps de dix mille esclaves.