Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 2.djvu/69

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qu’ils ne pouvaient en employer beaucoup à l’usage qui devait paraître le plus noble aux yeux d’un peuple belliqueux. Les guerres et les traités avaient introduit quelques espèces romaines, d’argent pour la plupart, chez les nations qui habitaient les bords du Rhin et du Danube ; mais les tribus plus éloignées n’avaient aucune idée de la monnaie. Leur commerce borné consistait dans l’échange des marchandises, et de simples vases d’argile leur paraissaient aussi précieux que ces coupes d’argent dont Rome avait fait des présens à leurs princes et à leurs ambassadeurs[1]. Ces faits principaux instruisent mieux un esprit capable de réflexion que tout le détail minutieux d’une foule de circonstances particulières. La valeur de la monnaie a été fixée, par un consentement général, pour exprimer nos besoins et nos propriétés ; comme les lettres ont été inventées pour rendre nos pensées. Ces deux institutions, en augmentant la force de la nature humaine, et en donnant à nos passions une énergie plus active, ont contribué à multiplier les objets qu’elles devaient représenter. L’usage de l’or et de l’argent est, en grande partie, idéal ; mais il serait impossible de calculer les services nombreux et importans que l’agriculture et tous les arts ont retirés du fer, lorsque ce métal a été épuré par le feu et façonné par la main industrieuse de l’homme. En un mot, la monnaie est l’attrait le plus universel de l’industrie humaine ; le fer en est l’instrument le plus

  1. Tacite, Germ., 6.