Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 3.djvu/146

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Rejeté par quelques personnages éminens du premier et du second siècle.

Sans des réflexions si consolantes, nous gémirions sur le sort de quelques personnages illustres, qui nous auraient semblé mériter plus que le reste des hommes de recevoir le présent céleste. Les noms de Sénèque, des deux Pline, de Tacite, de Plutarque, de Gallien, de l’esclave Épictète et de l’empereur Marc-Aurèle, honorent le siècle où ils ont fleuri ; et leurs caractères élèvent la dignité de la nature humaine. Soit dans la vie active, soit dans la vie contemplative, ils remplirent avec gloire leurs postes respectifs ; leur jugement excellent fut perfectionné par l’étude. La philosophie avait dégagé leur esprit des préjugés de la superstition, et ils passèrent leurs jours dans la poursuite de la vérité et dans la pratique de la vertu. Cependant (ce qui ne cause pas moins de surprise que de douleur) tous ces sages négligèrent ou rejetèrent la perfection de la doctrine chrétienne. Leur langage ou leur silence montre également leur très-profond mépris pour la secte naissante qui, de leur temps, s’était répandue dans l’Empire romain. Ceux d’entre eux qui ont daigné parler des chrétiens, les regardent seulement comme des enthousiastes opiniâtres et pervertis, qui exigeaient une soumission implicite à leurs dogmes mystérieux, sans pouvoir produire un seul argument capable de satisfaire un homme sensé et instruit[1].

  1. Le docteur Lardner, dans son premier et dans son second volume des Témoignages juifs et païens, rassemble