Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 3.djvu/200

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patientes de la multitude dénonçaient les chrétiens comme les ennemis des dieux et des hommes ; elles les condamnaient aux supplices les plus cruels ; et, poussant la licence jusqu’à désigner par leur nom les principaux chefs de la nouvelle secte, elles exigeaient impérieusement qu’ils fussent aussitôt saisis et jetés aux lions[1]. Les gouverneurs et les magistrats des provinces, qui présidaient aux spectacles publics, étaient assez portés à satisfaire les désirs du peuple et à en apaiser la rage par le sacrifice d’un petit nombre de victimes odieuses. Mais la sagesse des empereurs mit l’Église à l’abri de ces cris tumultueux et de ces accusations irrégulières qu’ils jugeaient indignes de la fermeté et de la justice de leur administration ; les édits d’Adrien et d’Antonin-le-Pieux déclarèrent expressément que la voix de la multitude ne serait jamais admise comme preuve légale pour convaincre ou pour punir ces infortunés livrés aux rêveries du christianisme[2].

Jugemens des chrétiens.

III. Le châtiment n’était pas une suite inévitable de la conviction ; et lorsque le crime avait été clairement prouvé par les témoins ou même par la confession volontaire du coupable, on lui lais-

  1. Voyez Tertullien (Apolog., c. 40). On trouve dans les actes du martyre de saint Polycarpe une vive peinture de ces tumultes, qui étaient ordinairement fomentés par la méchanceté des Juifs.
  2. Ces règlemens sont insérés dans les édits d’Adrien et d’Antonin-le-Pieux, dont nous avons parlé ci-dessus. Voyez l’Apologie de Méliton (ap. Euseb., l. IV, c. 26).