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Marc-Aurèle, méprisant les chrétiens comme philosophe, les punit comme souverain[1].

État des chrétiens sous le règne de Commode et sous celui de Sévère. A. D. 180.

Par une fatalité singulière, les maux qu’ils avaient endurés sous le gouvernement d’un prince vertueux, cessèrent tout à coup à l’avènement d’un tyran ; et comme ils avaient seuls éprouvé l’injustice de Marc-Aurèle, ils furent seuls protégés par la douceur de Commode. La célèbre Marcia, qui tenait le premier rang parmi ses concubines, et qui finit par conspirer contre les jours de son amant, avait conçu une affection particulière pour l’Église opprimée ; et quoiqu’il ne lui eût pas été possible de concilier la pratique du vice avec les préceptes de l’Évangile, elle pouvait se flatter qu’elle expierait les faiblesses de son sexe et de sa profession, en se déclarant patronne des chrétiens[2]. Sous la protection de Marcia, ils passèrent en sûreté les treize années d’une tyrannie cruelle ; et lorsque l’empire eut été établi dans la maison de Sévère, ils formèrent avec la nouvelle cour des liaisons particulières, mais plus honorables. On avait persuadé l’empereur que, dans une maladie dangereuse, il avait tiré quelque secours, soit physique, soit spirituel, de l’huile sainte dont il avait été oint par un de ses esclaves. Il traita toujours avec

  1. Sur ce miracle, que l’on appelle communément le miracle de la légion fulminante, voyez l’admirable critique de M. Moyle, vol. II, p. 81-390.
  2. Dion-Cassius, ou plutôt son abréviateur Xiphilin, l. LXXII, p. 1206. M. Moyle (p. 266) a représenté l’état de l’Église sous le règne de Commode.