Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 3.djvu/343

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se mêlèrent insensiblement à la masse du peuple[1]. Il en restait peu qui pussent faire remonter clairement leur origine aux premiers temps de Rome, ou même à l’enfance de la république, lorsque César et Auguste, Claude et Vespasien firent d’une partie des sénateurs un nombre de nouvelles familles patriciennes, dans l’espoir de perpétuer cet ordre, qu’on regardait encore comme respectable et sacré[2]. Mais ces nouvelles créations, dans lesquelles la famille régnante était toujours comprise, se trouvaient bientôt effacées par la fureur des tyrans, par les fréquentes révolutions, par le changement des mœurs, par le mélange des nations étrangères[3] ;

  1. L’an de Rome 800, il restait un très-petit nombre, non-seulement des anciennes familles patriciennes, mais même de celles qui avaient été créées par César et par Auguste (Tac. Ann., XI, 25). La famille de Scaurus (branche de la famille patricienne des Æmilius) se trouvait dans un tel état d’abaissement, que le père de celui-ci, après avoir été marchand de charbon, ne lui laissa que dix esclaves et un peu moins de trois cents livres sterl. (Valère-Maxime, l. IV, c. 4, no 11 ; Aurelius-Victor in Scauro.) Le mérite du fils sauva cette famille de l’oubli.
  2. Tacite, Annal., XI, 25 ; Dion-Cassius, l. LII, p. 693. Les vertus d’Agricola, qui fut créé patricien par l’empereur Vespasien, honorèrent cet ordre antique ; mais ses ancêtres n’étaient que dans la classe des chevaliers.
  3. Cet anéantissement aurait été presque impossible, si, comme Casaubon le fait dire à Aurelius-Victor (ad Suet. in Cæs., c. 42. Voyez l’Hist. Aug., p. 203, et Casaubon, Comment., page 220), Vespasien eût créé à la fois mille familles patriciennes ; mais ce nombre extravagant excède