Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 3.djvu/422

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du genre humain, imprime une tache ineffaçable sur la mémoire de Constantin, et rappelle au souvenir la conduite opposée d’un des plus grands monarques de ce siècle. Le czar Pierre, revêtu de toute l’autorité du pouvoir despotique, crut devoir soumettre au jugement de la Russie, de l’Europe entière et de la postérité, les raisons qui l’avaient obligé à souscrire la condamnation d’un fils criminel, ou du moins indigne de lui[1].

L’impératrice Fausta.

L’innocence de Crispus était si généralement reconnue, que les Grecs modernes, qui révèrent la mémoire de leur fondateur, sont forcés de pallier un parricide que les sentimens de la nature ne leur permettent pas d’excuser. Ils prétendent qu’aussitôt que Constantin eut découvert la perfidie qui avait trompé sa crédulité, il instruisit le monde de son repentir et de ses remords ; qu’il porta le deuil pendant quarante jours, durant lesquels il s’abstint du bain et de toutes les commodités de la vie ; et qu’enfin, pour servir d’instruction à la postérité, il fit élever une statue d’or qui représentait Crispus avec cette inscription : À mon fils que j’ai injustement condamné[2]. Ce conte moral et intéressant

  1. Histoire de Pierre-le-Grand, par Voltaire, part. 2, c. 10.
  2. Afin de prouver que cette statue fut élevée par Constantin, et malicieusement cachée ensuite par les Ariens, Codinus se crée tout à coup (p. 34) deux témoins, Hippolyte et le jeune Hérodote, et il en appelle avec effronterie à leurs écrits, qui n’ont jamais existé.