Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 3.djvu/454

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rent, en un seul jour, d’un fossé profond et d’un rempart élevé. Lorsque ses innombrables soldats furent rangés en bataille, ils couvrirent les bords de la rivière, les hauteurs voisines, et toute l’étendue d’une plaine de douze milles qui séparait les deux armées. Elles désiraient le combat avec une ardeur égale ; mais après une légère résistance, les Barbares prirent la fuite en désordre, soit qu’ils ne pussent soutenir le choc des Romains, ou dans l’intention de fatiguer les pesantes légions, qui, bien qu’accablées par la soif et par la chaleur, les poursuivirent dans la plaine, et taillèrent en pièces un corps de cavalerie pesamment armée, qui avait été posté devant la porte du camp pour protéger la retraite. Constance, entraîné lui-même dans la poursuite, tâchait inutilement d’arrêter l’impétuosité de ses soldats, en leur représentant les dangers de la nuit qui approchait, et la certitude de compléter leur succès au point du jour. Se fiant plus à leur propre valeur qu’à l’expérience ou à l’habileté de leur chef, ils imposèrent silence par leurs clameurs à ses sages remontrances, s’élancèrent dans le fossé, et se répandirent dans les tentes pour y réparer leurs forces épuisées et jouir du fruit de leurs travaux. Mais le prudent Sapor guettait le moment de la victoire. Son armée, dont la plus grande partie, secrètement postée sur les hauteurs, était restée spectatrice du combat, s’avança en silence à la faveur de l’obscurité ; et les archers persans, guidés par la clarté du camp, lancèrent une grêle de traits sur