Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 3.djvu/89

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qu’avant la conversion totale du genre humain, la guerre, le gouvernement, l’Empire romain, le monde lui-même, ne seraient plus, ils ne voulaient pas révéler aux idolâtres cette cause secrète de leur sécurité. On peut encore observer ici que la situation des premiers chrétiens se rapportait fort heureusement à leurs scrupules religieux, et que leur aversion pour une vie active, contribua plutôt à les détourner de servir l’état ou l’armée, qu’à les exclure des honneurs civils et militaires.

Cinquième cause. Activité des chrétiens dans le gouvernement de l’Église.

V. Mais l’esprit humain, quelque exalté ou quelque abattu qu’il puisse être par un enthousiasme passager, reprend par degré son niveau naturel, et se remet sous l’empire des passions qui semblent le mieux adaptées à sa condition présente. Les premiers chrétiens étaient morts aux affaires et aux plaisirs du monde ; mais cet amour de l’action qu’ils avaient reçu de la nature, et dont la trace n’avait jamais pu

    de l’encens sur l’autel : comme chrétiens, ils ne pouvaient assister aux fêtes et aux banquets, qui se terminaient toujours par des libations, etc. Enfin comme « les divinités et les rites innombrables du polythéisme étaient étroitement liés à tous les détails de la vie publique ou privée » les chrétiens ne pouvaient y participer sans se rendre, dans leurs principes, coupables d’impiété : c’était donc bien moins par un effet de leur doctrine que par une suite de leur situation qu’ils s’éloignaient des affaires ; partout où cette situation ne leur était pas un obstacle, ils montraient autant d’activité que les païens. Proindè, dit saint Justin martyr, nos solum deum adoramus et vobis in rebus aliis læti inservimus. (Apol., p. 64.) (Note de l’Éditeur.)