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Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 3.djvu/90

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être entièrement effacée, reparut bientôt, et trouva de nouveaux alimens dans le gouvernement de l’Église. Une société séparée qui attaquait la religion dominante de l’empire, était obligée d’adopter quelque forme de police intérieure, et de créer un nombre suffisant de ministres chargés, non-seulement des fonctions spirituelles, mais encore de la direction temporelle de la république chrétienne. Les soins relatifs à la sûreté de cette société, à son honneur, à son agrandissement, produisirent, même dans les âmes les plus religieuses, un esprit de patriotisme semblable à celui qui enflammait les premiers Romains pour leur patrie, et quelquefois les fidèles ne furent pas plus délicats sur le choix des moyens qui pouvaient conduire à un but si désirable. Lorsqu’ils sollicitaient pour eux ou pour leurs amis les dignités de l’Église, ils déguisaient leur ambition sous le prétexte spécieux de consacrer à l’utilité générale le pouvoir et la considération que, dans cette vue seulement, il était de leur devoir de rechercher. En exerçant leurs fonctions ils avaient souvent occasion de dévoiler les erreurs de l’hérésie ou les artifices de la faction ; de s’opposer aux desseins des faux frères, de les dévouer à l’opprobre qu’ils méritaient, et de les chasser du sein d’une société dont ils s’efforçaient de troubler la paix et le bonheur. On enseignait aux guides spirituels du christianisme à joindre la prudence du serpent à l’innocence de la colombe ; mais à mesure que l’habitude du commandement rendit leur conduite plus raffinée, insensiblement leurs