Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 4.djvu/504

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Une évolution de l’infanterie légère, qui fit tomber adroitement ses traits sur le dos des cavaliers et sur les jambes des éléphans, ne tarda pas à mettre en déroute cette masse effrayante de guerriers et d’animaux. Les Barbares prirent la fuite ; et Julien, qui se montrait toujours à l’endroit le plus dangereux, excitait ses troupes de la voix et du geste à la poursuite des Persans. Ses gardes tremblans, dispersés ou pressés par la foule tumultueuse des amis et des ennemis, avertirent leur intrépide souverain qu’il n’avait point d’armure, et le conjurèrent de se soustraire au péril qui le menaçait[1]. À l’instant même, les escadrons en déroute firent pleuvoir une grêle de dards et de traits ; et une javeline, après avoir rasé le bras de l’empereur, lui perça les côtes et se logea dans la partie inférieure du foie. Julien essaya d’arracher de ses flancs le trait mortel, mais le tranchant de l’acier lui coupa les doigts, et il tomba de cheval sans connaissance. Ses gardes volèrent à son secours, et, relevé avec précaution, il fut porté du milieu de l’action dans une tente voisine. Cette affreuse nouvelle se répandit de rang en rang ; la douleur des Romains leur donna une valeur invincible et leur inspira le désir de la vengeance. Les deux armées se battirent avec fureur jusqu’à ce qu’elles fussent séparées par la profonde obscurité

  1. Clamabant hinc inde Candidati (voyez la note de Valois) quos disjecerat terror, ut fugientium molem tanquam ruinam male compositi culminis declinaret. (Amm., XXV, 3.)