Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 5.djvu/327

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rôle de médiateur, et le prit pour garant de sa sincérité en même temps que de sa sûreté. Il parvint à faire instruire l’empereur de l’Orient de sa situation humiliante. Valentinien déclarait à Théodose, que s’il ne pouvait pas marcher promptement à son secours, il serait forcé d’essayer de fuir de son palais, ou plutôt de sa prison de Vienne dans la Gaule, où il avait imprudemment fixé sa résidence au milieu d’une faction ennemie ; mais dans l’attente de secours éloignés et douteux, l’empereur recevait chaque jour d’Arbogaste quelque provocation nouvelle. Le monarque irrité, mais dépourvu de conseil et d’appui, résolut trop précipitamment de rompre avec un puissant rival. Il reçut Arbogaste assis sur son trône, et au moment où le général s’en approchait avec quelque apparence de respect, Valentinien lui remit un papier par lequel il lui annonçait la perte de tous ses emplois. « Mon autorité, répondit l’audacieux Arbogaste, avec un sang froid insultant, ne dépend ni de la faveur, ni de la disgrâce d’un monarque. » Et il jeta dédaigneusement le papier à terre. Valentinien, indigné, saisit l’épée d’un de ses gardes, qu’il s’efforça de tirer du fourreau, et ce ne fut pas sans quelque violence qu’on parvint à l’empêcher de s’en servir contre un ennemi ou contre lui-même.

Mort de Valentinien, le 15 mai. A. D. 392.

Peu de jours après cette querelle extraordinaire, qui attestait sa faiblesse autant que sa colère, on trouva l’infortuné Valentinien étranglé dans son appartement ; Arbogaste prit quelques précautions pour se laver d’un crime qui était si manifestement le sien,