Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 5.djvu/444

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

rage[1]. » Depuis les Thermopyles jusqu’à Sparte, le chef des Goths continua sa marche victorieuse sans rencontrer un seul ennemi de nature mortelle ; mais un des prosélytes du paganisme expirant assure avec confiance que la déesse Minerve, armée de sa redoutable égide, et l’ombre menaçante d’Achille[2], défendirent les murs d’Athènes, et que l’apparition des divinités de la Grèce épouvanta le hardi conquérant. Dans un siècle fécond en miracles, il serait peut-être injuste de priver Zosime de cette ressource commune ; cependant on ne peut se dissimuler que l’imagination d’Alaric était mal préparée à recevoir, soit éveillé, soit en songe, les visions de la superstition grecque. L’ignorant Barbare n’avait probablement jamais entendu parler ni des chants d’Homère, ni de la renommée d’Achille : et la foi chrétienne qu’il professait dévotement, lui enseignait à mépriser les divinités imaginaires de Rome et d’Athènes. L’invasion des Goths, loin de venger l’honneur du paganisme, contribua, au moins accidentellement, à en anéantir les dernières traces, et les mystères de Cérès, qui subsistaient depuis dix-huit

  1. Plutarque (in Pyrrho, t. II, p. 471, édition Brian.) donne la réponse littérale dans l’idiome laconique. Pyrrhus attaqua Sparte avec vingt-cinq mille hommes d’infanterie, deux mille chevaux et vingt-quatre éléphans ; et la défense de cette ville sans fortifications fait un bel éloge des lois de Lycurgue, même au dernier période de leur décadence.
  2. Tel peut-être qu’Homère l’a si noblement représenté (Iliade, XX, 164).