Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 5.djvu/511

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et prouve peut-être son innocence ; le despotisme qui, après lui avoir ôté la vie sans examen, a flétri sa mémoire sans preuves, n’a aucun pouvoir sur le suffrage impartial de la postérité[1]. Les services de Stilichon sont grands et manifestes ; ses crimes, vaguement énoncés par la voix de la haine ou de l’adulation, sont pour le moins douteux et invraisemblables. Quatre mois environ après sa mort, un édit publié au nom d’Honorius, rétablit entre les deux empires la communication si long-temps interrompue par l’ennemi public[2]. On accusait le ministre, dont la gloire et la fortune étaient liées avec la prospérité publique, d’avoir livré l’Italie aux Barbares qu’il avait vaincus successivement à Pollentia, à Vérone et sous les murs de Florence. Son prétendu dessein de placer le diadème sur la tête de son fils Euchérius, ne pouvait avoir été conduit sans complice et sans préparations. Stilichon, avec de semblables vues, n’aurait pas laissé le futur empereur jusqu’à la vingtième année de sa vie dans le poste

    chambellan Deuterius. Stilichon s’était assuré un appui dans la chambre à coucher de l’empereur ; et il est étonnant que sous un prince faible cet appui ne l’ait point sauvé.

  1. Orose (l. VII, c. 38, p. 571, 572) semble copier les manifestes faux et violens que la nouvelle administration répandait dans les provinces.
  2. Voyez Cod. Théod., l. VII, tit. 16, leg. I ; l. IX, tit. 42, leg. 22. Stilichon est désigné par le nom de prædo publicus, qui employait ses richesses ad omnem ditandam, inquietandamque Barbariem.