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de Stilichon firent tout son crime. Sa généreuse répugnance à verser le sang de ses concitoyens paraît avoir contribué au succès de son indigne rival ; et la postérité, pour dernière preuve du mépris que mérita le caractère d’Honorius, n’a pas daigné lui reprocher sa basse ingratitude envers le protecteur de sa jeunesse et le soutien de son empire.

Le poète Claudien.

Parmi ceux de ses protégés dont le rang et la fortune ont mérité l’attention de leur siècle, notre curiosité se porte sur le célèbre poète Claudien, qui, après avoir joui de la faveur de Stilichon, fut entraîné dans la chute de son bienfaiteur. Les titres de tribun et de notaire lui donnaient un rang à la cour impériale. Par la puissante intervention de Sérène, il épousa une héritière opulente d’une province d’Afrique[1] ; et la statue de Claudien, élevée dans le Forum de Trajan, atteste le goût et la libéralité du sénat de Rome[2]. Lorsque l’éloge de Stilichon

  1. Aux noces d’Orphée (la comparaison est modeste), toutes les parties de la nature animée contribuèrent de quelques dons ; et les dieux eux-mêmes enrichirent leur favori. Claudien n’avait ni troupeaux, ni vignes, ni oliviers ; l’opulente héritière possédait tous ces biens ; mais il porta en Afrique une lettre de recommandation de la part de Sérène, sa Junon, et il devint heureux. (Epist. 2, ad Serenam.)
  2. Claudien a pour cet honneur la sensibilité d’un homme qui le mérite (in præfat. bell. get.). L’inscription sur marbre fut trouvée à Rome dans le quinzième siècle, et dans la maison de Pomponius-Laetus. La statue d’un poète infiniment supérieur à Claudien a dû être élevée durant sa vie