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Rapport du mari et des femmes.

L’expérience a prouvé que ce sont les sauvages qui tyrannisent les femmes, et que les progrès de la civilisation adoucissent d’ordinaire la condition de celles-ci. Dans l’espoir d’obtenir des enfans robustes, Lycurgue avait différé l’époque du mariage : Numa la fixa à douze ans, afin que l’époux pût élever à sa fantaisie une jeune vierge encore innocente et docile[1]. [Cérémonie religieuse du mariage.]L’époux, selon la coutume de l’antiquité, achetait sa femme, et celle-ci remplissait la coemption en achetant, avec trois pièces de cuivre, le droit d’entrer dans la maison et la protection des pénates du mari : les pontifes présentaient des fruits aux dieux, en présence de dix témoins ; les deux époux s’asseyaient sur la même peau de mouton ; ils mangeaient un gâteau salé de far (de froment) ou de riz ; et cette confarreation[2], qui rappelait l’ancienne nourriture de l’Italie, était l’emblème de l’union mystique de leur esprit et de leur corps : mais la femme s’assujettissait à une union sévère et inégale ; elle renonçait au nom et aux pénates de son père, pour embrasser une nouvelle servitude, décorée seulement du titre d’adoption. Une fiction

  1. Denys d’Halycarnasse (l. II, p. 92, 93) ; Plutarque (in Numâ, p. 140, p. 141). Το σωμα και το ηθος καθαρον και αθικτον επι τω γαμο‌υντι γενεσδαι.
  2. Parmi les frumenta d’hiver, on employait le triticum ou le froment barbu, le siligo ou le blé non barbu, le far, l’adorea, l’oryza, dont la description s’accorde parfaitement avec celles du riz d’Espagne et d’Italie. J’adopte cette identité d’après l’autorité de M. Paucton, dans son utile et laborieux ouvrage sur la Métrologie, p. 517-539.