Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 8.djvu/297

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il ne retirait aucun profit. À mesure que les mœurs de Rome s’adoucirent, l’humanité des accusateurs, des témoins et des juges, s’écarta du code criminel des décemvirs, dont l’excessive rigueur finit par produire l’impunité. La loi Porcia et la loi Valéria défendirent aux magistrats d’infliger à un citoyen une peine capitale, ou même un châtiment corporel ; et l’on imputa adroitement, et peut-être avec vérité, ces statuts sanguinaires tombés en désuétude, non pas à l’esprit des patriciens, mais à la tyrannie des rois.

Abolition ou désuétude des lois pénales.

Au défaut des lois pénales, et dans l’insuffisance des poursuites civiles, la juridiction privée des citoyens maintenait encore dans la ville une sorte de paix et de justice imparfaite. Les malfaiteurs qui remplissent nos prisons sont le rebut de la société, et on peut ordinairement attribuer à l’ignorance, à la pauvreté et à des passions grossières les crimes dont on les punit. Un vil plébéien pouvait abuser, pour obtenir l’impunité de ses crimes, du caractère sacré de membre de la république ; mais, sur la preuve ou même sur le soupçon du délit, on attachait à une croix l’esclave ou l’étranger, et l’on pouvait exercer sans obstacle cette prompte et rigoureuse justice sur le plus grand nombre des individus qui formaient la populace de Rome. Chaque famille avait un tribunal domestique qui n’était pas borné, comme celui du préteur, à la connaissance des actions extérieures ; la discipline de l’éducation inculquait des principes et des habitudes de vertu ; et un père répondait des